Le phénomène du bouc émissaire, version Astérix le Gaulois…
Le phénomène du bouc émissaire peut être résumé de la façon suivante :
Oui, le phénomène du bouc émissaire est un processus de réconciliation (les gaulois font la fête) fondé sur l’exclusion (ici celle du barde Assurancetourix) et sur la substitution (qui n’apparaît pas ici… qui se dévoile rarement… c’est le principe même de la substitution).
Bien souvent, on s’intéresse au bouc émissaire de cette façon,
c’est à dire à partir de la personne qui incarne la figure du bouc émissaire, celle qui est exclue.
Mais nous savons que si le phénomène du bouc émissaire est inévitable, ses effets en revanche ne sont heureusement pas inéluctables. Il n’y a donc aucune fatalité à la figure du bouc émissaire …
ici le forgeron Cétautomatix,
et ici personne … pas de bouc émissaire, tout le monde se retrouve autour du banquet …
Pourquoi la figure du bouc émissaire semble-t-elle être néanmoins, à un moment du processus, inévitable ? Nécessaire ?
Pour éviter cela …
… la violence du « tous contre tous, destructrice du groupe ». Dans une sorte de sagesse plus ou moins inconsciente, le groupe va cesser de s’entredéchirer.
Il va trouver une figure lui permettant de refaire son unité, d’oublier momentanément (nous y reviendrons) ses discordes.
Et voilà nos Gaulois unis, ici contre les Romains, précédemment contre leur barde.
Le phénomène du bouc émissaire permet donc le passage d’une violence du tous contre tous, destructrice du groupe, en une violence du tous contre un, reconstructrice du groupe, on peut dire salvatrice du groupe.
Plus haut, nous parlions de substitution.
La figure du bouc émissaire se substitue aux antagonismes réels, aux vrais sujets de discorde. Le barde Assurancetourix, même s’il chante réellement faux, même s’il casse réellement les oreilles des autres villageois, même s’il porte d’autres signes qui en font une victime potentielle, n’est qu’une victime de substitution.
Les vrais sujets de discorde, les antagonismes réels ? Ils sont par nature difficiles à identifier ; il est même périlleux de les dévoiler. En effet, ils génèrent de la rivalité entre les meilleurs amis,
comme entre les moins bons…
Cette discorde, cette zizanie, cette rivalité seraient dues, selon René Girard, au « désir mimétique »... On désire toujours ce que l’autre possède.
Qu’est ce qui génèrerait le phénomène du bouc émissaire ? Qu’est-ce qui ferait que l’on désirerait ce que l’autre possède ? Qu’est ce qui ferait que l’on imiterait l’autre dans son désir jusqu’à vouloir posséder ce qu’il est ?
Et l’objet du désir, de quelle force serait-il pour générer un bouc émissaire ?
Le savoir, la Sagesse ?
La force ?
Le pouvoir ?
Autre chose encore ?
Les antagonismes réels au sein d’un groupe sont non seulement difficiles à décrypter mais également insatiables, à l’image de ce que ces vignettes suggèrent.
C’est la raison pour laquelle le phénomène ne s’arrête avec la phase de réconciliation mais continue à travers un nouveau cycle.
Le phénomène du bouc émissaire est ainsi un processus cyclique qui enchaîne les étapes du cycle jusqu’à recommencer un cycle nouveau sans épuiser le désir mimétique…