L’ijime : le bouc émissaire nippon ?

L’ijime est un phénomene social courant dans les institutions japonaises, en particulier dans le milieu scolaire. En japonais, ijime signifie « intimidation », et recouvre les comportements, qui vont de la brimade à la violence en réunion. Ils sont destinés à sanctionner, ou pour le moins à signifier, l’exclusion d’un membre du groupe.

Dans la société très codifiée du Japon, la pression sociale et le fort besoin d’intégration au groupe,  s’expriment par un sadisme et une violence parfois insoutenables pour un occidental. Si les aspects les plus incongrus de ce phénomène sont visibles dans certains jeux de société, l’ijime s’exprime régulièrement par des drames, en particulier par le suicide d’écoliers, incapables de faire face à la pression du groupe.

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L’ijime est une réponse collective à la pression sociale, par le défoulement, souvent sordide, qu’il semble apporter aux « bourreaux » et aux spectateurs ; par là, il se rapproche du phénomène de la tête de Turc. Par son côté sadique, il se rapproche du phénomène du souffre-douleurs.

Mais il renvoie aussi nettement au bouc émissaire. En effet, il est l’occasion de faire corps, de se constituer puis reconstituer, « volontairement », comme groupe unifié afin d’éviter une explosion interne ; il est l’unité de mesure de la différence : la victime de l‘ijime est initialement et surtout « devenu différent » renvoyant peut-être au groupe sa dimension grégaire ; à la victime de l’ijime « malgré elle », répond une catégorie consentante, qui correspond à une victime volontaire qui, assumant pendant un temps les brimades, peut enfin savourer une singularité acquise de haute lutte.

 

Fabrice Audebrand