Institution, exclusion et bouc émissaire

Rémi CASANOVA, Philippe PETRY, in Revue de l’Enfance et de l’Adolescence, Jeunes, violences, institutions, n°89, 2014, pp.41-52.

 

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Un entretien autour des violences en institution, qui fait du bouc émissaire une question centrale.

Le résumé proposé par la revue : « Les équipes professionnelles dans les institutions diverses en contact avec les jeunes posant problème ne peuvent éviter de jouer avec la notion de bouc émissaire. Ainsi, le jeune est-il renvoyé d’institution en institution, permettant aux structures de fonctionner selon l’habitude. R. Casanova propose de réfléchir à d’autres modes de fonctionnement permettant non pas de supprimer cette pratique, mais d’en atténuer l’usage. »

L’article commence par ceci : « Philippe Pétry : Je souhaite travailler avec vous quelques thèmes développés dans vos articles traitant de l’institution et du bouc émissaire. Mais aussi quelques questions à partir de vos interventions réalisées en maison d’enfants à caractère social et en lycée professionnel concernant les sanctions. J’ai pu en constater l’efficacité puisqu’elles nous ont permis de diminuer notablement les exclusions.

J’ai pu constater l’utilité du travail de déconstruction des incidents et leurs effets sur la communauté des professionnels. Un fait rapporté par une personne est souvent monté en épingle et amplifié. Ce phénomène de groupe aboutit parfois à des demandes d’exclusion de celui qui est pointé comme insupportable.

Et se termine par ceci : « R. Casanova : Cela nous permet de revenir sur la question des violences négligées : certaines formes de violences latentes sont négligées parce que cela soulèverait des conflits forts si on s’en préoccupait. Or ce qui est négligeable pour les uns ne l’est pas forcément pour les autres. Cela renvoie à des questions d’éthique de l’institution : qu’évite-t-on d’aborder pour tenir le coup et ne pas provoquer de conflit majeur ?

Mais plus on néglige, plus la pétaudière se prépare. Ici on voit l’utilité d’une aide extérieure : l’intervenant extérieur peut aider à aborder des questions gênantes. Mais cet intervenant, s’il a d’une manière générale une expertise des situations de violence et d’exclusion, ne doit pas oublier que l’expertise des situations appartient à l’équipe. Il doit aider l’équipe à élaborer collectivement – c’est-à-dire ensemble et dans la diversité des différents points de vue professionnels – les problèmes dans son contexte à elle. Cela ne se limite pas à un déballage des questions difficiles, cela suppose la construction de dispositifs qui permettent à l’équipe de rechercher ensemble des solutions possibles et pertinentes pour elle. »